du coma à l'éveil des sens

La phase de réveil du coma peut se dérouler dans les services de réanimation ou de soins intensifs de neurochirurgie. Le respect de l'intimité de la personne y est difficile à préserver du fait d'un environnement de machines et de tuyauteries destinées à maintenir la vie, et de la présence nuit et jour de personnels de soin. Elle peut aussi se faire dans un service de médecine physique où la personne traumatisée est transférée dès que la réanimation respiratoire n'est plus une nécessité. Cette phase est marquée par une certaine confusion : la personne traumatisée "réapprend" à être dans son corps et à être avec les autres.

Se réapproprier son corps.

Durant la phase de réveil du coma, la personne traumatisée cérébrale explore son corps à la manière de l'enfant. Cette "réappropriation" conduit habituellement à des attouchements sexuels et à la masturbation, aussi bien chez l'homme que chez la femme, ce qui peut émouvoir le personnel de soin. Il est préférable que les équipes soignantes et les familles n'interviennent pas ou très peu, en particulier par la contrainte. Il n'y a pas de raisons de s'opposer à cette attitude, qui est une marque de la récupération cérébrale. Il est souvent nécessaire de libérer les mains si elles sont attachées et de veiller à retirer la sonde urinaire ou le pénilex s'il n'y a pas de risques majeurs de fuite.

La recherche du plaisir peut également s'accompagner d'une demande de participation des soignants ou des visiteurs, ce qui occasionne un sentiment de malaise. Il convient de l'éluder avec patience et sans réprobation.

Cette demande de plaisir s'étend à d'autres zones érogènes. Si le corps soigné est un lieu de souffrances, il peut aussi être un lieu de jouissance : sphères génitales, régions fessière, anale et orale en particulier. La toilette, le soin d'escarres, la vidange d'une ampoule rectale ou d'un sondage urinaire (qui implique chez l'homme de saisir la verge et de l'étirer) sont autant d'occasions involontaires de stimulation sexuelle. Le soignant, tout en respectant la personne, se doit de maintenir une attitude neutre et suffisamment distante pour ne pas déclencher de pulsions sexuelles difficiles à contrôler et toujours frustrantes, puisqu'elles n'aboutissent pas à la satisfaction du désir.

La tyrannie des sens.

À ce stade d'évolution de la lésion cérébrale, on observe habituellement une très forte sensibilité au toucher et à la voix. Elle correspond à une réaction primaire du cerveau, qui n'est pas encore capable de moduler ou d'adapter ses réponses.

À ce moment, les personnes traumatisées sont dans une relation à l'autre marquée par l'avidité et la tyrannie. L'affectif n'y a pas encore sa place. Le corps est hyper-réactif et ses réflexes se substituent à la volonté du blessé. Il faut en tenir compte et moduler les contacts physiques, par exemple à l'occasion des massages (anti-escarres, abdominaux, etc.) ou de la toilette, pour éviter le déclenchement de réponses érotiques et inopinées.

Dans le même temps, il faut s'efforcer d'humaniser ces lieux de vie froids (réanimation, soins intensifs, service de médecine physique) afin de reconnecter au plus vite la personne traumatisée avec une réalité humaine et chaleureuse qu'il a connue. Cela peut être fait avec l'aide de proches, par exemple en lui faisant entendre des voix familières ou des musiques que le patient connaît bien.